La Coupe du Monde de para-escalade à Innsbruck s’achève. Sur cette étape, 15 grimpeurs et grimpeuses français.es ont pris le départ et pour beaucoup : c’était une grande première sur la scène internationale. Sur cette étape, Aristotelis Liontos – entraîneur national de l’équipe de France para-escalade – a élargi la sélection. Cette décision suit le plan de développement et de structuration de la para-escalade mis en place par la FFME et piloté par Hélène Le Rouge, CTN référente en para-escalade.
Pour une discipline où tout reste à faire, cette décision semble ne concerner qu’une infime poignée de grimpeurs. Pourtant, il s’agit d’un élément qui a toute son importance dans un écosystème complexe.
Compétition et haut-niveau : vers une professionnalisation de la discipline.
La structuration du haut-niveau est un axe à part entière du plan de développement de la para-escalade en France. Pourquoi se focaliser sur le petit bassin du haut-niveau alors que tout reste à faire ?
- Parce que la compétition, notamment sur la scène internationale est un facteur de visibilité non-négligeable, duquel la discipline a besoin pour s’ouvrir au plus grand nombre.
- Parce que la proposition du Comité d’Organisation d’intégrer la para-escalade aux Jeux Paralympiques de Los Angeles 2028 ouvre des perspectives et que l’intégration de la discipline aux Jeux agira comme un booster : plus de visibilité, plus de médiatisation, plus de grimpeurs.
Et pour ça, le niveau de performance français doit s’élever : pour inspirer, pour montrer la voie, pour faire naître quelques vocations, pour donner de la visibilité à la discipline.
Aujourd’hui, la France est la 2ème nation en nombre de médailles sur la discipline, derrière les Etats-Unis. Pourtant la discipline est récente et la sélection pour l’Equipe de France – notamment pour participer aux étapes de Coupes du Monde aux Etats-Unis – est restreinte.
Alors, pour que les athlètes puissent prendre la température du niveau international, comprendre les exigences et les rouages du sport de haut-niveau, s’en imprégner et idéalement, y prendre goût : Aristotelis a élargi la sélection en emmenant sur l’étape d’Innsbruck les vice-champions de France en titre (en plus des champions de France).
Aujourd’hui, le circuit en para-escalade est composé d’une unique compétition officielle par saison, où certaines catégories ne sont pas suffisamment représentées pour pouvoir sacrer des champions et championnes de France. Ce manque de participants et participantes vient en partie du fait que le bassin de grimpeurs est petit.
Ceci-dit, pour augmenter le nombre de pratiquants, encore faut-il pouvoir accueillir ce public et ses spécificités.
Accompagner les clubs pour développer leur capacité d’accueil.
Les clubs qui accueillent les publics en situation de handicap sont référencés sur le Handi-Guide : une carte interactive – créée par le Ministère des Sports et des Jeux Olympiques & Paralympiques – qui permet de trouver une structure adaptée pour chaque handicap et ses spécificités.
En 2 ans, le nombre de clubs référencés a triplé (22 en 2022 contre 90 en 2024).
Pour les structures qui ne sont pas référencées, ce n’est pas du manque de volonté, il s’agit plutôt d’un manque de ressources :
- Matérielles : matériel ou structure, certains handicaps ont des besoins spécifiques. (des structures pas ou peu déversantes, par exemple)
En termes de matériel, le Footing Vertical des Frères Mawem va rendre la discipline encore un peu plus accessible. Ce dispositif sera présenté lors du Club France 2024 et on a aucun doute sur le succès de cette innovation.
- Temporelles : on connaît tous les gymnases de clubs et dans certains cas, le cours de basket en même temps que l’escalade : ça ne marche pas dans tous les cas !
- Humaines : des ouvertures adaptées et des séances d’escalade pertinentes, ça ne s’improvise pas.
- Formation Initiateur SAE (Structure Artificielle d’Escalade) & Handicap (prochaine formation du 26 au 29/09)
- Formations bénévoles du Comité Paralympique et Sportif Français
Malgré un intérêt croissant pour la discipline, tant du côté des clubs que des pratiquants, l’accueil des publics en situation de handicap ne se fait pas jour au lendemain.
Des temps d’échange sont régulièrement organisés auprès des dirigeants de clubs pour expliquer, vulgariser et faire connaître les dispositifs d’aides pour pouvoir ouvrir sa structure aux publics handicapés.
Il existe aussi des dispositifs qui accompagnent les clubs : notamment le programme « Club Inclusif » créé par le Comité Paralympique et Sportif Français pour les clubs, qui souhaitent ouvrir leurs portes aux personnes en situation de handicap et qui veulent être accompagnés dans cette démarche.
Et pour les ouvreurs ? Le projet est lancé pour pouvoir proposer une formation. L’objectif étant d’avoir des ouvreurs formés aux spécificités des différentes catégories de handicaps dans chaque région. À ce jour, deux ouvreurs se chargent d’ouvrir les compétitions de para-escalade (Christophe Cazin & Yoris Delahaye)
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L’escalade est un sport accessible : rendons-le visible.
La discipline est récente, c’est ce qui explique en partie qu’elle n’a pas encore la visibilité qu’elle mérite. Réseaux sociaux, presse, actions auprès du grand public, les initiatives se multiplient, des performances font parler de certains et certaines, nos grimpeurs sont médaillés sur les coupes du Monde, titrés aux championnats du monde…Il y a de quoi susciter plus d’une vocation !
Et… Il y a aussi le regard des gens sur le handicap (ou la différence ?), qui n’existe pas dans la petite sphère du haut-niveau, d’ailleurs. Aussi élitiste qu’il soit, c’est aussi un milieu très inclusif.
Aristotelis le dit lui-même : à Arco ou à Innsbruck, il y a les équipes para-escalade à côté des équipes nationales de bloc et d’Adam Ondra et c’est normal pour tout le monde. Il n’y a pas de regards en biais ou de chuchotements indiscrets.
Comportement à généraliser, donc.
Los Angeles 2028 en ligne de mire : de quoi faire naître des rêves !
Hélène Le Rouge et son équipe ont commencé à structurer le développement de la para-escalade en France en 2022 et accomplissent, en sous-marin tout un travail de structuration en 4 grands axes :
- Faire connaître la para-escalade
- Créer du lien avec les clubs / Développement de l’accueil et de l’offre de pratique au sein des clubs
- Fidéliser l’engagement du pratiquant
- Structurer la compétition et le haut-niveau
C’est tout un réseau qui s’active : ministères, réseaux médico-sociaux, Comités Sportifs Nationaux, Comités Paralympiques, et fédérations en tout genres …Les résultats commencent à pointer le bout de leur nez, mais on sait très bien que ce qui est fait aujourd’hui portera ses fruits dans plusieurs années, c’est le jeu.
Les Jeux Olympiques de Los Angeles 2028 pourraient bien agir comme un booster pour la discipline. Le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques (COJO de Los Angeles 2028 a proposé au Comité International Olympique (CIO) d’ajouter la para-escalade à la liste des sports paralympiques, devenant ainsi le premier Comité d’Organisation à proposer un nouveau sport pour les Jeux Paralympiques. Et c’est officiel depuis hier : la para-escalade rejoindra le programme initial des sports paralympiques de LA28.
L’Escalade est un sport accessible et c’est une aubaine.
On aimerait que l’escalade puisse ouvrir des portes, offrir des possibilités, susciter l’envie, le rêve, l’espoir. Pour commencer à changer le regard, on peut commencer par admirer la performance plutôt que de souligner le handicap. En regardant les compétitions diffusées en live sur la chaîne YouTube de l’IFSC, par exemple, ce serait un bon début !
Voici les prochaines échéances pour nos grimpeurs & grimpeuses :
- 24 & 25 Août : championnats d’Europe (Villars, Suisse)
- 27 & 28 Septembre : championnats du monde (Arco, Italie)
Si vous avez manqué l’étape de cette semaine à Innsbruck, c’est par ici que ça se passe :